José l'anarchiste
Ce
n'était pas une maison bleue adossée à la colline, mais une vieille
baraque qui donnait, à l'Ouest sur la RN 20, à l'Est sur les voies de chemin de fer de la ligne
Paris-Orléans. Il y avait un poêle au milieu de la pièce principale sur
lequel Carmen, l'hiver, mettait à chauffer une brique. Une fois à bonne température,
elle l'emballait dans une serviette et la glissait au fond de mon lit pour que j'y pose les pieds.
On ne sait jamais, la mort arrive toujours par les pieds disait-on aux
enfants. Alors je cessais de pleurer. C'était en 1960, j'avais deux ans ; je me demandais bien ce que je fichais
là et pourquoi je n'étais pas avec ma mère et mes sœurs. Eux, je les
voyais les fins de semaine et puis, les dimanches soirs, José me
ramenait à Cercottes dans sa 2CV brinquebalante. C'était qui ce José,
d'ailleurs ? Je viens de l'apprendre au hasard de mes déambulations sur le net. Voilà :
En 1932, il se fait remarquer dans les manifestations et les revendications en faveur des prisonniers. Après le soulèvement fasciste de juillet 1936, il s'engage dans la colonne Durruti et combat sur le front d'Aragon dans plusieurs régions (Osca, Monte Aragón, Estrecho Quinto…). Durant cette année, depuis le front de Huesca, il collabore à la revue Vida Nueva de Terrassa. Avec la militarisation la colonne Durruti fera partie de la 26e Division jusqu'à la fin de la guerre.
pendant des mois que mon père revienne.
Pendant la retraite, le 10 février 1939, il traverse le pont international de Puigcerdà (Baixa Cerdanya) avec les restes de la 26e Division du Xe Corps de l'Armée Populaire de la République. Les troupes passent en parfaite formation militaire par le pont international de Llívia. Comme son patron, l'anarchiste Ricardo Sanz, l'écrira dans son livre Los que fuimos a Madrid. Colonne Durruti. 26 División (1969, pages 285-286) : en passant le pont une section de soldats français leur présentera les armes tout en rendant honneurs à l'ensemble de la formation en retraite, respect aux combattants qui ont défendu, pendant près de trois ans, dans les tranchées leurs idéaux
Il a été incarcéré dans un complexe militaire français improvisé à Guingueta d'Ix (Haute Cerdagne) et plus tard avec des centaines de soldats de la 26e Division de l'Armée Populaire de la République dans le camp du Vernet-d'Ariège (Ariège, Occitanie)*, puis vers d'autres domaines français.
Après la Seconde Guerre mondiale, militant du Mouvement de libération espagnol (MLE) en exil, il crée l'Association de Relations et Solidarité de Terrassa. On retrouve ses articles dans Boletín Amicale 26 División, Cenit, Espoir et Orto.
Je n'ai plus jamais revu José Payán Berenguer. Il s'est éteint le 3 février 2001 dans une maison de retraite en bord de Loire, à Meung, dans le Loiret. Il est enterré à Cercottes où il s'était établi avec sa famille. Carmen lui a survécu encore une quinzaine d'années avant de s'éteindre à son tour à la veille de ses 100 ans. Celui que j'appelais Titi – Germinal de son vrai prénom – mon grand frère de l'époque, avait quitté ce monde très jeune. Marie-Thérèse, l'aînée, vient de fêter ses 80 ans. Je l'embrasse.
* Le camp du Vernet-d'Ariège, nous apprend le site Chemin de mémoire, était destiné à l'internement des "étrangers indésirables". En 1940, il servira à interner d'autres indésirables : les juifs.
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